L'AGNEAU NOIR,
Les résistants non révolus. Tâchés et touchés par le secret de la révolte. Etouffés par un monde qu'ils ne veulent plus, qu'ils n'ont jamais voulu. Ils ont encore l'espoir, juste l'espoir. Ils ont l'espoir et l'auront encore quand bien même ils auront tout perdu. Ils ont l'espoir quand ils voient un enfant jouer, un couple sourire, une veuve pleurer. Et pour que cet espoir puisse un jour être engloutit par la victoire, ils sont prêts à donner leur vie. Ou prendre celle d'autrui. Car ils en sont persuadés, aucune liberté ne leur sera accordé sans une organisation meurtrière. Le meurtre oui, au nom de l'égalité. Et peut-être que cette nuit, qui sait, ils rêveront d'un monde qu'ils ont choisi.

L'AGNEAU ARGENTÉ,
L’espoir, eux aussi l’ont, même si parfois ils ne peuvent plus y croire. Qu’ils soient jeunes ou vieux, malade ou heureux, ils n’aiment pas ce qui se trame derrière eux. Décolorés, ils ne sont jamais devenus agneaux noirs, car malgré l’espoir, il leur reste tant de choses à faire sans autorité. Alors, oui, peut-être leurs moyens pacifistes ne suffisent-ils pas, peut-être même les risques qu’ils prennent, le manque ils ne combleront pas. Mais il veulent vivre, et aiment vivre pour cela, car d’une certaine façon, un jour et ensemble, peut-être ne feront-ils qu’un.

L'AGNEAU BLANC,
Insignifiants ? Peut-être. Ceux-ci n’ont rien à cacher. Du moins c’est ce que tout le monde croit. Ils sont pourtant la majorité, et un pied entre deux rives, ils ont décidés de contempler assidument le fleuve puissant du destin pour y prendre part quand bon leur semble. Si telle doit être l’autorité, alors ils vivront avec. Ils se lèvent, travaillent, aiment et haïssent. Ils n’ont jamais voulu d’héros et de guerre, ils savent que le temps passe et ne revient pas, qu’ils ne lui survivront pas. Alors ils continuent à se lever, à travailler, à aimer et haïr. C’est simple et compliqué à la fois, car malgré ce choix, de chaque côté du juste ils sont tirés par foi.

L’AGNEAU DORÉ,
Les privilégiés. Ils ne l’auraient peut-être pas été dans une autre société, mais dans celle-ci, ils sont sûrs d’être protégés. L’éternité au bout des doigt, la volupté aussi. Qu’ils l’aiment ou en profitent, ils ne veulent pas un autre régime que celui qui leur est proposé. C’est bien simple, ils sont saufs et pensent fermement que l’autorité les préserve d’une liberté qui pourrait leur être fatale. Et l’Etat leur rend bien. La plupart jouissent d’un luxe qu’ils disent mérité, les autres attendent d’en jouir. La plupart sont heureux, les autres attendent de l’être. La vérité, c’est que leur statut leur promet à la fois l’éphémère et l’instant d’après.

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